Myriam Frégonèse est née à Vichy dans l’Allier. Elle a longtemps travaillé avec les adolescents à travers d’ateliers d’écriture et dirige aujourd’hui un hôpital psychiatrique.
Voici un roman dont la signification dépasse les révélations, Recoudre la nuit traite de l’identité et des troubles identitaires.
Violaine intimement persuadée d’être juive a cousu une étoile jaune sur son manteau. Sa mère la place en hôpital psychiatrique pour la protéger de sa folie car voilà dehors c’est la guerre, l’Occupation. À l’Asile, c’est l’horreur, les nazis laissent les pensionnaires des hôpitaux psychiatriques crever de faim. Terriblement affaiblis, ils offrent un spectacle de misère psychologique et physiologique. Violaine occupée à combattre ses démons survole cette période effroyable car sa force réside dans sa déraison, elle avance, trouve des réponses et découvre l’amour.
Myriam Frégonèse a placé la folie au cœur de son roman, la folie de Violaine, la folie de la guerre et la folie du gouvernement en place qui décide de passer sous silence l’enfer des établissements psychiatriques.
Est-ce que « Recoudre la nuit » est votre premier livre ?
Recoudre la nuit est mon premier roman publié. Avant cela j’ai écrit d’autres textes non publiés. La route est longue avant la première publication. C’est une épreuve de réalité et une mise à l’épreuve du désir d’écrire à la fois. Le titre du roman m’a été inspiré par la citation de Jaccottet qui est en exergue. Cela faisait écho à la question de la couture de l’étoile qui permet à Violaine de sortir un peu, tout du moins de manière singulière, de sa nuit psychique.
Quels sont les thèmes que vous développez dans votre livre et quels sont ceux qui vous tiennent le plus à cœur ?
Le thème central de ce livre est la question « Qui suis-je ? ». Chacun de mes personnages, et Violaine en premier lieu, tente de répondre à cette question, pour tenir dans ce monde insensé, ou pour refuser la fatalité. A partir de cette question, ça n’est pas tant un développement que j’ai voulu, qu’une traversée des relations humaines lorsque tout est fait pour que la vie s’arrête. Je me suis plongée dans le regard de Violaine, celui de Lorette et de tous les autres pour tenter de trouver quelque chose qui ramène à la vie, au désir, comprendre en quoi la folie, dans un tel contexte, fragilise et renforce à la fois. Les aliénés, j’en ai rencontré bon nombre, sont des soldats, leur courage et leur force sont remarquables. Je me suis permis d’entrer, le temps de quelques pages, dans leur logique humaine et poétique.
Comment avez-vous découvert cette histoire et dans quelles circonstances avez-vous décidé de la révéler dans un livre ?
Certains personnages, comme Violaine, Lorette et Marcel, sont mes « patients intérieurs », c’est-à-dire qu’ils sont le fruit d’une construction intime, clinique et romanesque à la fois. Je les ai immergés dans un contexte historique réel peu connu, celui des hôpitaux psychiatriques durant la seconde guerre mondiale, et les ai confrontés à de purs personnages littéraires, comme Dr Faure, Kurt ou Alter. Je n’ai pas découvert cette histoire dans une malle de famille ou dans les derniers propos d’un ancien sur son lit de mort. Elle n’a existé que sur ma scène psychique et pourtant les faits sont réels. J’en suis certaine. La réalité s’occupe toujours de dépasser notre imagination.
Des projets littéraires pour la rentrée ?
Le 6 Octobre une rencontre signature aura lieu à la Librairie à la Page rue Sornin à Vichy. À l’automne, j’ai une nouvelle à paraître dans un collectif pour les dix ans de Zonaires éditions. Ils avaient lancé un concours auquel j’ai participé il y a plusieurs mois. Sinon en ce moment je termine un second roman qui aura un tout autre décor, un propos différent, plus actuel, mais la question de la déraison y occupera encore une place de choix…on ne se refait pas. À chacun ses démons…
Recoudre la vie, Myriam Frégonèse, L’Oiseau parleur Editions,125 p , 15 euros.
https://loiseauparleur.fr