Wallace Azor est un jeune artiste peintre émergent. Après avoir participé au festival Pulp à la Ferme du Buisson et avoir remporté le prix du public de l’édition 2021 du Luz-art, il se lance dans la réalisation de projets d’expositions indépendants. Le premier, intitulé LE MEILLEUR DES MONDES, nous faisait entrer dans un univers horrifique en suivant l’évolution d’un personnage confronté à différents malheurs (la pauvreté, la violence, le viol subi par sa mère…). On retrouve ce personnage enfant dans son deuxième projet intitulé 3919 Selon Anny Kleis, exposé à la galerie Bertrand Grimont en mai 2023. En effet, c’est à travers les yeux de cet enfant que l’on découvre la triste réalité des violences faites aux femmes, dans ce cas-là subies par sa mère.
C’est à la suite de ce projet engagé que l’artiste a décidé de préparer une série d’expositions intitulée ZAZAK! au sujet très personnel : sa relation avec son petit frère autiste. On y retrouve les œuvres du peintre, mais aussi celles de son frère enfant. Ce projet “à quatre mains” nous plonge dans un tourbillon d’émotions et de sentiments parfois contradictoires alliant amour, détresse ou encore colère et violence. Cet univers inédit mêlant œuvres introspectives et dessins d’enfant nous plonge dans la réalité de cette fratrie particulière.
La première exposition de la série aura lieu le premier weekend d’octobre 2024, le vernissage étant le samedi 5 octobre à partir de 19h, au 4 place de Thorigny à Paris.
Pourquoi ZAZAK! Que signifie le titre ?
Ce titre est inspiré du prénom de mon frère Isaak : la plupart de ses proches, dont notre père, l’appellent Zazak. Je trouvais que c’était parfait pour le titre de l’exposition, car c’est à la fois bizarre, intrigant et amusant. J’ai décidé de le mettre en majuscule avec un point d’exclamation pour mettre en avant l’aspect d’urgence et de panique dans les moments compliqués que je peux vivre avec lui. Il sonne comme une onomatopée, un éclat de rire ou de colère qui montre bien la dualité de notre relation.
Quel est le concept de l’exposition ?
C’est la confrontation de mon art et celui de mon petit frère autiste. Nous n’avons qu’un an d’écart et nous dessinions beaucoup étant petits, il a arrêté aux alentours de ses douze ans, mais j’aime beaucoup ce qu’il a créé. Étant autiste non verbal, c’était une façon pour lui de s’exprimer autrement qu’avec des mots et on retrouve des éléments amusants liés à notre quotidien, comme des personnages ou des titres de dessins animés que nous regardions ensemble. J’ai décidé de réunir nos univers pour créer un projet à quatre mains, mettant en avant notre relation et la complexité de mes émotions vis-à-vis de celle-ci. Je mêle donc les aspects artistiques et psychologiques d’une fratrie particulière.
Quelle est ta relation avec ton frère ?
C’est une relation tumultueuse et spéciale. Comme je l’ai mentionné plus tôt, il est autiste non verbal, il comprend, mais n’est pas capable de parler. Notre relation se base donc beaucoup sur les regards, les gestes ou des mots simples. J’ai employé le terme « tumultueuse », car je dois aussi faire face à des crises très violentes lorsqu’il exprime sa colère ou son désaccord. Cette violence répétée mène à beaucoup de colère et d’incompréhension qu’on a tendance à vouloir camoufler. Cette relation demande une implication psychologique et émotionnelle constante, il faut toujours être en alerte et anticiper ses réactions. C’est pour cela que l’on retrouve un aspect très sombre dans mon exposition, j’extériorise en quelque sorte ces émotions, je montre une réalité difficile et j’exprime des sentiments qui sont généralement considérés comme “tabous”, mais dont il ne faut pas avoir honte.
Comment est-ce que tu mets en image la complexité de cette relation et les émotions qu’elle engendre ?
J’ai décidé de diviser cette représentation en deux : tout d’abord en réalisant des œuvres totalement inspirées du travail de mon frère, avec énormément de références à des dessins animés comme Toy Story ou Aladin ou à des personnages comme Spiderman. Tout cela avec un style bien à lui caractérisé par un aspect enfantin et très référencé pouvant faire penser à de l’art moderne ou contemporain. Je mets ces œuvres en dialogue avec ses créations afin de créer une sorte de discussion entre nos univers. Ensuite, j’ai décidé de faire des œuvres très introspectives en m’inspirant de mon environnement : l’Italie. J’ai en effet séjourné presque un an dans ce pays afin de m’imprégner de l’art italien et des différents maîtres de la peinture. Ils m’ont notamment inspiré dans la représentation de scènes bibliques qui font souvent écho à ce que je peux ressentir. J’ai été élevé dans une famille croyante et il me semblait cohérent d’intégrer des images inspirées de scènes religieuses dans mon projet. Le sujet que j’aborde est très personnel et il était important pour moi de trouver une iconographie accessible pour que le public ressente réellement ce que j’ai voulu exprimer.
Quel est le public visé ? Et quel impact aimerais-tu que cette série d’expositions ait sur les gens ?
Je n’ai pas un public en particulier en tête, je veux que le plus de personnes possibles soient touchées par ce que je vais proposer. Mais je pense évidemment en premier lieu aux frères et sœurs de personnes atteintes du trouble du spectre autistique, qui sont les mieux placées pour comprendre mon exposition. Je pense aussi aux parents, qui seront à mon avis très réceptifs. Je souhaite que l’aspect enfantin de ce projet puisse toucher les plus jeunes, et que l’aspect personnel et plus profond puisse toucher les adultes. Même si c’est un thème très précis, je pense que cela peut parler à tout le monde d’une certaine manière. Je veux que le public soit touché par le thème de la fratrie dans le handicap et qu’il ait une idée plus précise de ce à quoi notre réalité peut ressembler, car c’est un sujet qui manque cruellement de représentation.
© EDITH VAREZ
C’est très puissant et touchant.
Je viendrai voir votre exposition, qui me parle personnellement.
Merci pour ce sujet.
Nous suivons ce jeune et talentueux artiste depuis plusieurs années. Plusieurs de ses œuvres ornent les murs de notre maison. Nous avons hâte de découvrir cette nouvelle exposition et de compléter notre collection. Un message fort, servi par un talent et une maturité incontestables. Un artiste à suivre de près.